Cathy au titre des Visites Citoyennes, rend régulièrement visite à des personnes retenues au CRA. Voici un compte rendu de sa visite le 18/01/2023.
Ayant été contactée il y a 2 jours pour rendre visite à monsieur Z, originaire de Tunisie, au CRA depuis le 03 janvier, et qui a entamé une grève de la faim pour contester les conditions de rétention. Ne pouvant voir un cardiologue alors qu’il souffre de problèmes cardiaques, il a alors refusé de prendre son traitement. J’ai pu échanger au téléphone ces derniers jours avec lui, très stressé, mais n’ai pas pu le voir en raison de son audience au TA* cet après midi.
Ai pu rencontrer son compagnon de chambre, monsieur R, âgé de 46 ans, également originaire de Tunisie, au CRA depuis le 31 décembre. Monsieur R a été arrêté alors qu’il dormait à Montpellier dans le hall d’un immeuble. Monsieur est en France depuis 15 ans, a vécu 4 ans à Nantes où il travaillait dans le secteur de l’isolation, la peinture et déco intérieures. Son employeur nantais l’a mis en relation avec un employeur montpelliérain, il a commencé à travailler mais n’avait pas encore de logement, il devait signer son nouveau contrat et avoir un studio trouvé par son employeur mais son arrestation a tout freiné pour lui. Un ami de Toulouse s’est présenté au CRA ce matin pour lui rendre visite, il lui apportait des vêtements et des lunettes dont il avait besoin, mais sans lui expliquer la raison, la PAF* a interdit la visite.
Monsieur R a demandé à voir l’infirmière hier, mais elle lui aurait mal parlé et a refusé de le soigner alors qu’il souffre des yeux, ses lunettes étant cassées, il voulait simplement des gouttes dans ses yeux, mais pas possible. Monsieur R m’explique qu’il y a actuellement beaucoup de tension dans le CRA et que des sanctions ont été appliquées par la PAF suite à une forme de rébellion pour contester le manque d’eau chaude. Enervés certains retenus auraient cassé le plexiglass dans la salle TV et depuis les relations policiers/retenus se sont durcies, la PAF a retiré la grande TV pour en mettre une petite qui dysfonctionne, elle a également transféré deux retenus, qui contestait les conditions de rétention, dans les CRA de Nîmes et Marseille.
Monsieur R se dit fatigué, a déjà connu le CRA de Lille en 2012 et celui de Rouen en 2015 mais celui de Sète est pire que que les autres selon lui, il souhaite demander l’aide au retour en Tunisie bien qu’il n’ai personne là bas à part une jeune soeur mais mariée à un homme avec qui il ne s’entend pas..
Heureusement une belle solidarité existe entre les retenus, plusieurs tunisiens, algériens marocains, ivoiriens, nigérians, environ une vingtaine de personnes retenues ce jour. Monsieur R a vu le représentant consulaire de Tunisie à Nîmes, il attend d’être reconnu par son consulat pour demander son retour, il espère avoir un réponse rapidement pour partir au plus vite, s’il est encore au CRA, il devrait revoir le juge des libertés le 31 janvier.
Non seulement l’eau chaude ne fonctionne toujours pas, mais la saleté des parties communes, la nourriture mauvaise et le manque d’activités sont une fois de plus mentionnés, plus l’accès aux soins difficile et certaines visites refusées.
Aujourd’hui l’accueil a été déplorable, on m’a fait attendre dehors longtemps, j’ai rappelé 2 fois pour que quelqu’un vienne me chercher, une femme policière très désagréable m’a interpellée car le portail s’étant enfin ouvert, je suis rentrée dans la cour sans attendre que le policier qui venait à ma rencontre arrive au portail. Ensuite j’ai dû attendre seule dans le parloir longtemps, au bout d’un moment, à ma demande, j’ai revu la policière m’ayant mal parlé me disant que je n’étais pas obligée d’attendre et que je pouvais partir si je voulais alors que monsieur R était de nouveau à l’infirmerie, sans succès de sa demande mais personne ne m’en avait informé.
En sortant j’ai re mentionné le problème d’eau chaude mais il m’a été répondu par une autre policière qu’elle n’était pas plombier et n’y pouvait rien, j’ai également demandé pour la TV, mais pareil la policière a dit « s’ils ont un mauvais comportement, normal d’être sanctionnés ». Lui ai fait remarqué qu’être policier n’était peut être pas incompatible avec un peu d’humanité..
Suis partie écoeurée et surtout triste pour toutes ces personnes enfermées et dénuées de tout respect de leurs droits humains.
*T. A. : Tribunal Administratif (ndlr)
*PAF : Police aux frontières (ndlr)