Pendant 8 semaines, Hugues de Wurstemberger, en résidence d’artistes à la Maison de l’image documentaire (MID) a arpenté les étangs autour de Sète. De Bruxelles où il vit depuis 30 ans, il met la dernière main à un livre de photographies et à une exposition qui sera présentée lors de l’édition 2021 d’imageSingulières.
Ne cherchez pas un portrait de sétois ou de sétoise sur la couverture du livre réalisé par Hugues de Wurstemberger pour l’édition 2021 d’imageSingulières, le rendez-vous de la photographie documentaire. Cette année, ce sera une « très belle courge » , explique le facétieux suisse né à Berne en 1955, membre de l’agence Vu et enseignant à l’école du 75 à Bruxelles. Un clin d’œil bien à l’image de ce grand barbu truculent, qui manie l’humour belge, sa patrie d’adoption, avec un sens de la formule avéré. Le nez au vent, il a entrepris pour cette carte blanche, d’arpenter de long en large les étangs de Thau, d’Ingril et de Vic. Un milieu fragile et magnifique, où il est allé à la rencontre des paysages et des gens qui en vivent, maraîchers, viticulteurs, pêcheurs, conchyliculteurs…Leur particularité ? Tous travaillent leur territoire avec un respect total pour leur environnement. Un point de vue pas vraiment anodin, en ces temps de réchauffement climatique et de pandémie. L’événement, permettra en tout cas, c’est sûr, de prendre la mesure de ce grand photographe qui sait si bien, avec tendresse et poésie, transfigurer l’ordinaire.
L’ancre : « C’est la première fois qu’un résident d’imageSingulières tourne son regard vers les étangs et les gens qui y travaillent. Pourquoi avoir choisi un tel sujet ? »
Hugues de Wurstemberger : « Nous étions en plein Covid et Sète avait été déjà beaucoup traité, j’ai donc décidé de tourner autour des étangs et d’évoquer les personnes qui y travaillent de façon artisanale. Ils représentent pour moi l’avenir de l’agriculture. Je traîne, je regarde, j’apprends. Et en général, je rate mes premières images et j’y retourne. Ainsi, j’ai participé aux vendanges au domaine de Roquemal à Villeveyrac, conduit en bio. J’y suis revenu trois fois. Je suis aussi allé quatre fois chez Annie Castaldo, une des rares conchylicultrices qui travaille de l’huître naturelle. Cela me permet de comprendre les problématiques liées à l’équilibre très fragile des étangs. Puis, j’articule tout cela un peu différemment, sur un mode évocateur. Mon parti pris, ce sont les plantes sauvages et l’environnement, un sujet qui me tient à cœur».
L’Ancre : » Comment vous êtes-vous retrouvé en résidence à Sète ? «
Hugues de Wurstemberger : «imageSingulières est le seul festival que je pratique. Pour moi, c’est l’occasion de revoir des amis ou de rencontrer des gens. J’avais été approché il y a quatre ans par Gilles Favier, le directeur artistique d’imageSingulières. Mais j’ai refusé deux fois car j’étais débordé par l’enseignement et il faut disposer d’au moins 2,5 mois pour sortir une centaine d’images valables. Mais finalement, cette année grâce au Covid, j’ai pu venir en prenant une partie sur mes vacances de mi-août à mi-septembre ».
L’Ancre : « Votre premier sujet en tant que photographe était sur la garde suisse du Vatican, quelle mouche vous avait piqué »?
Hugues de Wurstemberger : « Grâce à une voisine du dessous qui m’avait pistonné, j’ai été hallebardier confirmé au Vatican (sourire !). Puis je me suis dit que cela valait le coup d’y retourner pour faire une sorte de journal de « garde suisse ». J’ai ensuite montré mon travail à Christian Caujolle, fondateur de l’agence Vu. C’est ce qui m’a mis le pied à l’étrier dans le métier. Cela m’a aussi permis de rencontrer Charles Henri Favrot, qui montait le Musée de l’Elysée à Lausanne, et qui a exposé ce travail en 1985. Puis, ce furent les débuts de l’agence Vu et les années Libération. C’était très agréable de bosser avec des journalistes. On faisait de vrais sujets et on pouvait en vivre. Quand tu sors d’une école d’art, tu as tendance à ciseler tes photos alors que là nous étions dans la rapidité du quotidien, ce qui était super. Ensuite, je me suis consacré à des sujets comme « Pauline et Pierre », une chronique de 18 années de ma famille, les agriculteurs des montagnes suisses ou les sahraouis chez qui je suis retourné six fois. Ce sujet a d’ailleurs été présenté à Sète il y a cinq ans, dans un thème plus général sur le désert et a créé quelques remous».
L’Ancre : « Comment avez-vous travaillé ? »
Hughes de Wurstemberger : » Une photo est une mise à plat de la réalité, alors autant faire dans la simplicité. Et si elle est plus que cela, c’est parce qu’il y a une espèce de grâce, mais cela ne marche pas toujours. Là, j’ai travaillé en vertical et en noir et blanc avec un argentique pour les paysages. Par contre les portraits sont en numérique et en couleur, car les fonds de la résidence sont limités. ”
imageSingulières
Hugues de Wurstemberger, Chapelle du Quartier Haut du 12 au 30 mai, puis à la Maison de l’Image Documentaire du 17 juin au 24 juillet 2021.
imageSingulières du 12 au 30 mai 2021. Programme en ligne sur www.imagesingulieres.com