LNMP Montpellier Perpignan : un projet contestable

Les membres de Alerte Lgv Thau proposent ici une lecture détaillée de ce grand projet inutile qui menace notre environnement.

L’État et la SNCF veulent créer une ligne nouvelle à grande vitesse entre Montpellier et Perpignan (LNMP). L’association Alerte LGV Thau (ALT, basée à Poussan) s’est constituée pour obtenir un autre tracé. Celui qui est prévu comporte des risques importants – environnementaux, économiques, patrimoniaux, paysagers. Nous voulons qu’il soit reconsidéré, au bénéfice d’un tracé moins coûteux et plus écologique, qui permette à l’ensemble des Occitans, de souche ou d’adoption, de bénéficier pleinement de ce projet, alors qu’en l’état, ils n’en subiront que des désagréments – nombreux, coûteux, marquants et durables.

Des impacts négatifs


  1. Impacts écologiques directs et irréversibles
    Les contraintes techniques liées à la grande vitesse ne permettent pas le contournement de zones sensibles (villages, zones naturelles, sites patrimoniaux…). Le tracé envisagé devrait traverser 12 sites Natura 2000, 25 zones écologiques, ainsi qu’un bon nombre de zones humides et de captages d’eau.
    Le projet de tracé actuel comporte un viaduc de 1400m et 28m de haut, sur une trentaine de piliers en béton.
    En longeant de très près une partie de l’Étang, il enlaidit et dénature définitivement le site. Les travaux nécessaires à sa construction entraineront une dégradation durable et irréversible de l’écosystème sur des kilomètres. Le chantier modifiera le microclimat, augmentera le risque de pathologies végétales et mettra en danger la biodiversité́. Au total, 800 espèces végétales et animales seront impactées, dont certaines qu’on ne trouve qu’en Occitanie.
  2. Choix contre-productif pour le Fret et la réduction des gaz à effet de serre
    Le tracé prévu est issu du scénario « LGV voyageurs à 320 km/h et fret à 120 km/h » présenté dans le dossier du maître d’ouvrage en 2009. Pour un coût estimé de 2 milliards d’euros (valeur mai 2006), ce scénario prévoit la construction d’une ligne où les trains de voyageurs circuleront jusqu’à 320 km/h et cohabiteront avec des trains de marchandises uniquement entre Montpellier et Béziers.

À cause du coût lié à la grande vitesse, le scénario retenu réduit la probabilité́ de construction d’une ligne mixte entre Béziers et Perpignan. Or, la mixité totale de la ligne est indispensable pour créer, entre la France et l’Espagne, une offre de transport ferroviaire propre à réduire les ruptures de charge et le nombre de camions sur l’A9, et diminuer les nuisances et émissions de gaz à effet de serre liées à la circulation de ces camions dans notre Région.

  1. Effet systémique désastreux pour l’économie et le patrimoine locaux
    Outre son impact écologique, le tracé actuel mettra en difficulté agriculteurs, viticulteurs, ostréiculteurs, oléiculteurs, éleveurs, apiculteurs, car les terres annexées subiront les ravages et les dégâts de la construction de la LGV.
    Le tracé actuel conduit de facto à un ré-enclavement de Sète, exclue du projet de tracé.
Les temps de trajet pour aller prendre un TGV à Montpellier seront triplés, et impliqueront une augmentation du trafic automobile, et donc, encore plus de pollution.
    Le tracé conduit aussi à une perte d’attractivité de Sète et du Bassin de Thau, à une baisse de la qualité de vie et de la capacité de mobilité douce pour la population.

Ce projet va entrainer une hausse de la fiscalité, par la contribution qui sera exigée des particuliers et des entreprises pour financer la part imputée aux collectivités locales, ainsi que par la « taxe pour équipement complémentaire (!) ».
Tous ces facteurs pénaliseront les activités liées au thermalisme et au tourisme, à la nature et la biodiversité́, au foncier et à l’immobilier, et la création d’entreprises nouvelles. Le tout, pour un « gain » de temps discutable au regard d’une évaluation coûts/bénéfices. Citoyens et entreprises du Bassin de Thau auront tous les inconvénients du projet, et aucun avantage.


Des compensations ?

Nous avons organisé des rencontres publiques, auxquelles ont participé des élus locaux, divers représentants d’associations, des entrepreneurs et des citoyens. Les dommages que nous exposons ici ont été évoqués. Les interrogations du public n’ont reçu aucune réponse satisfaisante. Parmi les nombreuses questions, l’une est récurrente : peut-on raisonnablement compenser la destruction de ressources et d’espaces naturels ?
La construction de la LGV génèrera un bilan carbone qui sera compensé en 240 ans. Le chantier passera sur le lieu majeur de captage d’eau potable pour l’agglomération de Sète. 800 espèces végétales et animales, patrimoniales, sont menacées, ainsi que 2000 hectares de zones naturelles et agricoles… Pour tout cela, quelle « compensation » ? Réponse des pouvoirs publics : de l’argent, des plantations pour l’avenir, etc…
À notre connaissance, les modalités et les fléchages de ces compensations ne sont pas définis. Quoi qu’il en soit, « compenser » nous parait être une réponse de pis-aller, à ce qu’on n’a pas su, ou pas voulu, éviter. De l’avis de nombreux citoyens, ce « pragmatisme » cache mal une résignation et/ou un déficit de vision, de clairvoyance.
Nos propositions
Pour le tracé : nous proposons de revenir au scénario “ Ligne nouvelle voyageurs à 220 km/h et fret à 120 km/h” – qui était également présenté dans le dossier du maître d’ouvrage en 2009 ! Pour un coût estimé de 3.9 milliards d’euros, ce scénario d’une ligne mixte entre Montpellier et Perpignan, où circuleraient à la fois des trains de voyageurs à 220 km/h et des trains de marchandises plus lents, serait moins coûteux et plus pertinent.
Conçu pour accueillir des trains à une vitesse de 220 km/h, le tracé serait plus sinueux afin d’épouser davantage les caractéristiques du paysage, certes, mais propre à préserver des zones naturelles, agricoles ou d’intérêt patrimonial.

Le tracé de la nouvelle ligne.

Même à 220 km/h, le gain de temps de la LNMP pour les voyageurs sera toujours très appréciable : 30 minutes entre Perpignan et Paris, au lieu des 40 minutes prévues par le tracé actuellement envisagé. En outre : rouler à 220 km/h au lieu de 320 consommera moins d’énergie.
Enfin, du fait de son coût réduit, cette option permettrait d’investir massivement dans la mobilité́ ferroviaire au quotidien sur l’ensemble du territoire Occitanie, au bénéfice de tous les habitants de la Région.
Un engagement citoyen
Certes, notre proposition procède d’abord d’une défense légitime de l’intérêt des habitants de Thau et, plus largement, d’Occitanie. Au-delà, notre propos veut questionner le politique et le citoyen : en 2024, compte tenu du futur qui vient vers nous, comment peut-on concevoir encore de « compenser » la perte d’une ressource en eau ? La destruction d’espaces naturels ? La disparition d’espèces ?
Notre proposition s’inscrit dans un ensemble de demandes exprimées par la population : respect du vivant et de la biodiversité́, nouvelle approche des ressources et des priorités vitales, préservation et relance d’activités liées à la nature et respectueuses de celle-ci, réponse aux attentes des citoyens en termes de qualité de vie, de mobilité́ et de préservation de leurs patrimoines. Pour eux-mêmes et pour les générations futures.
Nos actions et nos soutiens
Nous avons commencé par tenir des réunions publiques, pour sensibiliser la population de l’Agglomération. Au fil des réunions et des rencontres, nous avons constaté qu’une bonne partie de cette population ne se rend pas compte de ce qui se prépare. Or, quand les travaux commenceront, il sera trop tard pour se lamenter. Le défi pour nous est de faire prendre conscience au plus grand nombre de la monstruosité de ce projet.
Nous avons obtenu le soutien d’élus : M. Josian Ribes, Maire de Montbazin, et M. Sébastien Rome, Député de l’Hérault, œuvrent contre le projet de LGV. M. Josian Ribes vote contre le projet dès qu’il le peut lors des conseils de Sète Agglopole. D’autres Maires du Bassin de Thau sont aussi sur cette ligne, par exemple Mme Florence Sanchez, Maire de Poussan. M. Sébastien Rome nous a expliqué avoir déposé à l’Assemblée nationale une proposition visant à rendre obligatoire l’étude d’un scénario alternatif (scénario à vitesse réduite permettant un tracé qui respecte les territoires traversés) pour tous les projets de LGV en cours.
Grâce aux dons de nombreux particuliers du Bassin de Thau et au don de la Mairie de Bouzigues, en avril 2023, ALT a déposé un recours en Conseil d’État. Ce recours vient d’être rejeté, avec des arguments qui ne nous satisfont pas.
Nos besoins
Nous allons continuer d’agir en multipliant et diversifiant nos actions, et nous avons besoin de vos soutiens – connaissances, compétences, réseaux, ressources matérielles. Un peu partout sur le territoire se multiplient les mouvements de contestation de projets inutiles, coûteux, liés à des arrangements électoraux, relevant d’une logique ancienne et de choix périmés. Ces mouvements recueillent l’adhésion d’un nombre croissant de citoyens. Nous espérons profiter de cette dynamique.
En remerciant vivement L’Ancre de Sète.
Notre actualité : https://www.facebook.com/AlerteLgvThau
Pour nous rencontrer : alerte.lgv.thau@gmail.com
Les membres d’ALT