Un superbe spectacle donné au théâtre Molière, dans le cadre d’Escale à Sète. « Tous les marins sont des chanteurs »
Dans ce spectacle plein d’humour François Morel était accompagné par des musiciens de grande qualité et les enfants de la classe à horaire aménagé « musique » de Sète. Sous couvert d’une conférence sur l’auteur breton, c’est une vraie célébration de la vie, comme une veillée chantante entre ami.e.s. De chansons en chansons il commence par célèbrer le bar comme l’endroit qui réunit les gens de mer de toutes conditions. Souvent seuls ou isolés sur les navires, les aventures collectives se passent aussi à terre, au bistrot. Il évoque aussi la révolte dans la bonne humeur, la critique sociale par l’humour et la grivoiserie… La marine ce n’est pas que le respect de l’autorité et l’obéissance, c’est aussi la mutinerie, symbolique ou réelle. Quand le marin-poète vous taille le portrait, c’est court et efficace et la hiérarchie en prend pour son grade. Quitte à sortir des clichés sur la vie maritime, autant le dire : le vrai réconfort, le marin ne le trouve pas chez les filles du port. Loin de la compétition viriliste du comptoir, l’amour est intime, c’est la tendresse, le foyer, mieux encore que le port d’attache. Et quand il chante « Quand un homme », on entend une dédicace éternelle aux marins de l’Aquarius, de la Louise Michel, de l’Ocean Viking, de l’Open Arms, … et merde à ceux qui les entravent dans leur mission d’humain.
L’exil et la vie nomade ne sont pas si facile pour les gens de mer, alors chanter « Adieu Brest » ? T’as beau pas être Breton, tu le comprends. Où reste-t-il l’amour ? À terre ou dans ton cœur ? Et sans faire ici le tour de chant complet, il nous faut retenir aussi l’hymne anticapitaliste et écologiste que constitue « la pêche à la morue » : Les capitalistes veulent toujours plus d’argent, quitte à détruire les océans, quitte à détruire les travailleurs. La concurrence brise les hommes, volent leur vie et leurs plaisirs.
Alors voilà, près de 2h de spectacle pour évoquer les joies et tristesses des marins qui inspirent les poètes et chanteurs. Les chants de marins y sont célébrés comme une culture radicalement démocratique, du peuple, par le peuple, pour le peuple… On est ému.e aux larmes, après avoir ri franchement. Alors quand les musiciens s sont approchés pour finir, et que j’ai reconnu aux premiers accords « les amis d’autrefois » d’Anne Sylvestre, …
Un album et un livre permettent de faire durer le plaisir à la maison, ou d’en profiter si on n’a pas vu le spectacle.